Je prends la plume pour dire que je ne me reconnais pas dans ce que l’on dit de moi dans la presse
Nous relayons le témoignage d’une habitante de Liffré-Cormier pour la rubrique Courrier des lecteurs, envoyé à Ouest-France le 21/11/2022, jamais publié.
Je prends la plume pour vous dire que je ne me reconnais pas dans ce que l’on dit de moi depuis 2 semaines dans la presse, à la radio, à la télé.
Je me considère comme madame tout le monde investie dans la vie de mon territoire au sein d’associations et depuis quelques années privilégiant les achats et activités locales afin de limiter mes déplacements et contribuer à la pérennisation d’initiatives locales (Amap, maraîchers , boulanger …) qui font que ce bassin de vie est dynamique et agréable à vivre .
Je ne pense pas être une des personnes radicalisées anticapitaliste qui tente d’imposer sa loi par la violence et par le harcèlement comme l’a dit Fabrice Lesaché , vice-président et porte-parole du MEDEF sur RMC le vendredi 11 novembre au direct de 8.14 (https://fb.watch/gSjphNnQoJ/).
Je fais simplement partie d’un groupe de personnes habitant majoritairement la communauté de communes de Liffré – Cormier et ayant un lien d’intérêt avec ce territoire et qui s’investit au sein d’un collectif appelé CoLERE( Comité Local pour l’Environnement et la Résilience Écologique.) pour que nos élus prennent en compte les problématiques liées au réchauffement climatique, à l’effondrement de la biodiversité et à la fracture sociale laquelle est actuellement aggravée par la difficulté à se loger, le coût des énergies et l’inflation qui en découle.
Nous ne sommes absolument pas contre la création d’emplois comme diverses voix semblent le laisser entendre. Mais nous pensons que le taux de chômage actuel sur Liffré –Cormier étant un des plus bas de France (5.3 % selon OF du 5/10/22), cela nous donne du temps pour réfléchir à quelles activités nous souhaiterions accueillir afin de contribuer à la création d’un territoire résilient, qui aurait la capacité à anticiper, à réagir, à s’adapter pour se développer durablement quelles que soient les perturbations auxquelles il doit faire face.
C’est pourquoi il nous semble que les 500 emplois promis par Bridor dans le cadre de l’implantation à Liffré d’une unité de fabrication de viennoiseries et de pains surgelés dont 70 % des 650 tonnes de production journalière sont destinés à être transportés aux 4 coins du monde pour alimenter l’hôtellerie de luxe et les paquebots de croisière est un non-sens d’autant que suite à la concertation publique de septembre 2020,la communauté de communes a reconnu dans la réponse apportée à un de nos membres que si la zone d’activités de Sévailles 2 était développée comme l’a été la zone contiguë Sévailles 1, c’est-à-dire en accueillant plusieurs petites et moyennes entreprises (PME) , les emplois générés pourraient être d’environ 480 .
Ne devrait-on pas considérer qu’accueillir 500 emplois dépendants d’un seul employeur est un pari assez osé de la part de nos élus ? Ne seraient-ils pas tombés dans le piège de la facilité? Avant d’être validée, l’urbanisation de Sévailles- 2 n’aurait-elle pas mérité une prospective sérieuse concernant le modèle de territoire souhaitable pour faire face aux enjeux environnementaux et sociétaux qui nous attendent ?
Quels sens prendront ces emplois lorsqu’en pleine pénurie d’énergie et/ou d’eau et/ou de matières premières (tels que le beurre – les œufs -etc… ) , les salariés continueront à fabriquer des croissants destinés à une clientèle de luxe, alors que dans leur vie quotidienne il leur sera demandé de restreindre leurs consommations car la production agro-alimentaire sera prioritaire en cas de délestage suivant les propos de Marc Fesneau, ministre de l’agriculture lors de l’inauguration du salon international de l’alimentation le 15 octobre 2022.
Selon le SRADDET, Liffré n’a plus que 21 hectares de terres artificialisables à sa disposition pour les huit prochaines années permettant d’accueillir des activités, au-delà, il faudra soit réinvestir des secteurs déjà urbanisés soit réorienter les postulants vers les autres communes de Liffré –Cormier au risque de les voir partir ailleurs, là où les accès aux grands axes routiers seront plus directs.
Nous, les membres du soi-disant groupuscule radicalisé anticapitaliste pensons que nos élus doivent revoir leur positionnement afin que les dernières terres dédiées aux activités suivant le PLU de Liffré soient prioritairement mises à la disposition d’entrepreneurs qui participeront au bien-être de tout le bassin de vie : en offrant des emplois bien sûr mais aussi en produisant des biens tournés vers l’avenir et permettant l’autonomie alimentaire aux habitants. Les secteurs porteurs de toutes ces attentes sont divers et variés. Certains existent déjà, mais d’autres vont probablement apparaître en fonction des découvertes scientifiques et de l’évolution des modes de vie.
Qu’est-ce qui pousse nos élus à offrir ce dernier territoire à une seule entreprise qui, certes , apportera à très court terme des dividendes pour nous assurer à nous bobos et cadres moyens locaux un renforcement de l’offre de loisirs déjà très confortable. Renforcement que nous devrons au labeur des salariés de Bridor, mais dont très peu pourront profiter en raison du coût élevé de l’immobilier à Liffré rendant l’accès quasi–inaccessible pour la majorité d’entre-eux.
Nous sommes bien loin de toutes les recommandations de développement durable actuellement préconisées dans toute opération d’urbanisme en implantant une seule entreprise sur un site d’une surface de 21 hectares de bocage situé en tête d’un bassin versant , comprenant des zones humides, traversée d’est en ouest par une allée forestière plantée d’arbres centenaires.
Le process industriel de Bridor nécessite une plateforme parfaitement de niveau :c’est donc sans scrupules ni considérations de la typologie du lieu (15 mètres de dénivelé entre le nord et le sud ) qu’est prévue l’implantation des surfaces bâties et des aires de circulation et de livraisons extérieures : le terrain sera creusé en partie nord sur 8 hectares environ et cela jusqu’à 8 mètres de profondeur pour remblayer la partie sud d’autant , détruisant ainsi la faune, la flore, les zones humides du site.
C’est pourquoi, nous pensons qu’un autre mode de développement est impératif pour que nos enfants puissent survivre sur cette terre que nous allons leur léguer. C’est aussi pourquoi nous allons continuer à défendre notre vision d’un monde alternatif qu’il est tout à fait possible de mettre en œuvre à condition de ne pas être subjugués par le chant des sirènes de la conformité du monde d’avant, basé sur l’idée que les richesses de notre terre étaient inépuisables.
Merci d’avoir prêté attention à ce billet d’humeur d’une prétendue activiste qui a juste envie que ses petits enfants puissent apporter leur contribution à la marche du monde .
M.Rigourd , habitante de LIFFRE –CORMIER ( 35).