Les bonnes résolutions de nos élus pour le projet Bridor-Liffré en 2023 : parmi les multiples coûts induits pour les habitants figurera aussi l’eau !

Les bonnes résolutions de nos élus pour le projet Bridor-Liffré en 2023 : parmi les multiples coûts induits pour les habitants figurera aussi l’eau !

16 janvier 2023 0 Par adrien

Suite aux sécheresses de cet été, un article paru dans la Chronique Républicaine en novembre 2022 annonçait une augmentation généralisée des prix de l’eau.1 Or, sachant que le besoin en eau est l’argument majeur contre l’installation de l’usine de panification et viennoiseries congelées Bridor à Liffré, nous étions curieux d’en savoir plus sur l’évolution locale du prix de cette ressource naturelle. A cette fin, nous nous sommes procuré la délibération communautaire fixant les futurs prix de l’eau potable au sein de Liffré Cormier Communauté (LCC).2

Crise sécheresse

Une volonté affichée d’économiser l’eau, mais des efforts qui portent encore et toujours sur les mêmes…

D’après celle-ci, les tarifs de l’eau potable devraient effectivement progressivement augmenter pour la plupart des Liffréens, dès l’an prochain, pour atteindre 2,7 fois leur prix actuel en 2029,3 avec une augmentation moyenne de 6 % prévue en 2023 (8,3 % pour l’achat d’eau potable et de 5,5 % pour le retraitement des eaux usées). Cependant, ces tarifs dépendront aussi de la quantité consommée. A ce propos, quelle ne fut pas notre surprise de constater que cette tarification était fort avantageuse pour les plus gros consommateurs et que cette faveur leur serait maintenue jusqu’en en 2029, voire au-delà, malgré le nivellement géographique des prix prévu pour chaque tranche. Ainsi, un Liffréen se trouvant dans la tranche majoritaire (31-120 m3/an) payera à l’achat 0,43 cts d’euro (HT) le m3 en 2023, alors qu’un très gros consommateur (> 1 000 m3/an) payera seulement 0,35 cts d’euro (HT) le m3 à l’année, c’est-à-dire 18 % moins cher !

Par exemple, si l’usine Bridor était opérationnelle à Liffré en 2023, avec sa consommation annoncée de 187 000 m3/an,4 elle économiserait environ 15 000 euros par rapport aux petits consommateurs appartenant à la tranche majoritaire pour son acquisition d’eau potable. De plus, comme cette usine ne renverrait qu’une partie minime de cette eau dans le réseau collectif des eaux usées,5,6 il se pourrait même qu’elle ne participe quasiment pas aux frais d’assainissement de l’eau, alors qu’elle contribuerait grandement à sa pollution, avec 75 000 m3 d’eaux de lavage issues de ses lignes de production, chargées en détergents divers, épandues dans les environs de Liffré tous les ans.7 Bref, si le projet Bridor-Liffré devait voir le jour demain, nous aurions là un énorme consommateur d’eau, contribuant très significativement à la raréfaction de cette ressource vitale, mais aussi à la dégradation de sa qualité,8 et pour lequel une partie importante des coûts associés à sa consommation ainsi qu’à son assainissement serait déportée vers les autres contribuables. Maintenant, si à cet arbitrage généreux opéré par nos élus, on rajoute les autres « cadeaux » déjà consentis à ce projet, comme le prix de vente du terrain viabilisé à 10 euros le m2 (qui représente un manque à gagner de 5 250 000 euros pour le contribuable)9 ou la prise en charge du raccordement électrique de l’unité de production par LCC (210 348 euros),10 on voit mal pourquoi Louis Le Duff, propriétaire du groupe Bridor, voudrait aller s’installer ailleurs.11 En effet, la règle en vigueur pour tout projet capitalistique n’est-elle pas de parvenir à mutualiser les frais et de privatiser les bénéfices ?

Ainsi, lorsque les élus de LCC, au terme du conseil du 15 novembre dernier, annonçaient vouloir s’engager plus résolument vers la transition écologique,12 on voit qu’il leur reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour atteindre cet objectif vertueux. M. Stéphane Piquet, président de la communauté de communes, rappelait aussi, à cette occasion, que sans investissement industriel, les impôts locaux allaient fatalement augmenter pour les contribuables. Que faut-il réellement penser de cette affirmation alors que la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)13 est déjà annoncée pour 2024 ?14 A notre avis, au vu des coûts indirects qu’entraînera l’usine Bridor pour les habitants de LCC, il conviendrait plutôt de s’interroger sur la pertinence d’héberger cette entreprise écocide8 à Liffré, car la CVAE une fois supprimée, c’est d’autant moins d’argent qui « ruissellera » dans les caisses communautaires.

Sur ces quelques mots, nous vous souhaitons tout de même une très bonne année 2023, en vous recommandant toutefois une grande vigilance par rapport à la réalisation de ce projet inquiétant.

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Notes

1 Voir : « Liffré-Cormier : Les tarifs de l’eau vont augmenter presque partout » par B. Fouque, La Chronique Républicaine (24/11/22).

2 « Tableau récapitulatif des tarifs d’eau potable 2022 et 2023 » (Annexe 1) : tarifs de l’eau votés le 15/11/22 par le conseil communautaire de LCC.

3 Ceci afin d’arriver à un tarif géographiquement uniforme pour une tranche de consommation donnée au sein de LCC à cette date, conformément au principe d’égalité de tous les citoyens devant le service public.

4 Voir l’autorisation environnementale accordée au projet Bridor-Liffré (arrêté préfectoral N° 44726 (1/07/22), pp. 15/48 & 18/48) : Sur 187 000 m3 consommés, l’eau récupérée suite à la réfrigération (volume non précisé) sera renvoyée au milieu naturel après vérification de son pH, alors que les effluents issus du lavage des lignes de production (75 000 m3/an) seront épandus.

5 Voir  aussi le document de concertation (31/07/20) fourni lors de la concertation publique de la CNDP, p. 52/75 : l’essentiel de l’eau rejetée (85 000 m3/an) ne sera pas récupérée dans les eaux usées mais sera majoritairement épandue, seule l’eau des sanitaires (env. 11 000 m3) sera renvoyée au réseau via la station d’épuration de Liffré.

6 Voir encore les conclusions de l’enquête publique portant sur la demande de permis de construire présentée par la société Bridor en vue de construire une usine de pains et viennoiseries (Partie II. Avis et conclusions de l’enquête publique (13/05/22), p 56) : sur le total consommé, une partie de l’eau sera utilisée pour la fabrication (48 %), une autre pour le lavage des lignes de production (32 %) et le reste (30 %) pour la réfrigération.

7 Voir plan d’épandage proposé dans le projet : Documents de l’EP portant sur l’AE et le PC présentés par la société Bridor en vue de construire et d’exploiter une usine de fabrication de pains et viennoiseries (04/07/22), annexes 1 à 8 – Étude d’Impact (EI).

8 Autant à travers sa production que lors de sa construction, car celle-ci occasionnera la destruction d’une tête de bassin versant (Chevré) contenant plus de 10 000 m2 de zones humides, indispensables pour la filtration de l’eau de ruissellement (cf. Lettre Ouverte de CoLERE N° 7 (13/03/22) sur notre site).

9 Le terrain viabilisé voisin de Sévailles-1 a été vendu à prix coûtant 35 euros/m2 aux PME de cette zone, ce qui correspond à un manque à gagner de 25 euros/m2 (cf. Lettre Ouverte de CoLERE N° 6 (01/02/22) sur notre site).

10 Voir le devis ENEDIS pour le raccordement électrique de Bridor-Liffré adressé à la Mairie de Liffré (service Urbanisme-Foncier), le 17/01/22 et la lettre de S. Piquet à G. Bégué du 12/07/22 lui garantissant la prise en charge du coût de ce branchement par Liffré Cormier Communauté (réf. BM/IS/ 2022-170 ; PC 035152 21 U0074 ; documents disponibles avec la demande de PC).

11 Contrairement à la suggestion récente d’une lectrice de Ouest-France faite dans le courrier des lecteurs : « Bridor. Un consensus devrait pouvoir exister » (24/11/22).

12 « A Liffré-Cormier communauté, les communes investissent dans des développements durables », Ouest-France (18/11/22).

13 La CVAE et la cotisation foncière des entreprises (CFE) constituent les principales ressources financières revenant à LCC, or la première est souvent bien plus conséquente, car indexée sur le chiffre d’affaire, l’autre ne concerne que la valeur locative.

14 Promesse faite par l’actuel gouvernement à la commission européenne. Voir par exemple à ce propos : « Bientôt la retraite à 70 ans ?» par M. Zemmour, Le Monde diplomatique N° 824 (nov. 2022).

15 Ces dons nominatifs effectués en ligne sont défiscalisables. Un don peut également être fait en espèces ou par chèque bancaire, adressé à La Nature en Ville, et envoyé à l’adresse de cette association (La Nature en Ville, 5 Rue Eugène Quinton, 35200 Rennes).